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A propos de la visite d'une entreprise

Dans :  Sciences et Techno › Techniques pédagogiques › organisation de la classe › 
Mars 1997
I. Le sens d'une visite 
 
La visite d'une entreprise est bien tentante à l'école : c'est la vie, enfin !
Mais elle est souvent décevante pour la classe comme pour ceux qui l'accueillent. L'entreprise considère le plus souvent la visite comme une mini - information professionnelle ; elle axe son projet sur la transformation du produit. Or pour les jeunes enfants d'une part, l'idée de transformation est un processus difficile à concevoir et, d'autre part, la fabrication est souvent peu spectaculaire et l'exposé accompagné d'un vocabulaire technique qui opacifie encore le procès.
L'organisation sociale d'une entreprise semble plus facile à maîtriser.
Visiter une entreprise, c'est simple si on la considère simplement, c'est - à - dire lorsque la classe construit, expérience après expérience, une grille de lecture de l'entreprise.
Ainsi, plutôt que la transcription de modèle adulte, on utilisera ce qui est déjà le bien de la classe en question. Par exemple, une classe avait expérimenté, pour construire de bons articles, le système des "cinq W" (en anglais ! ) : QUI ? QUOI ? OU ? QUAND ? COMMENT ?
Reprenons le ici :
QUI ?
- qui travaille dans l'entreprise ?
- qui dirige ? qui décide ? qui est " l'entreprise" ?
- qui a fourni l'argent pour l'installation? pour la modernisation, s'il y a lieu ?
- qui fait du profit ou rembourse les pertes ?
- qui a décidé des produits à fabriquer ?
QUOI ?
- quels sont les produits fournis ?
- quelles sont les matières premières nécessaires à la transformation ? quelle est l"énergie employée ?
OU ?
- pourquoi avoir choisi ce lieu d'implantation ?
- quelles sont les relations avec l'extérieur : provenance de l'énergie et des matières premières, lieux de vente, moyens de communication, accumulation des déchets s'il y a lieu ?
QUAND ?
- date d'installation de l'entreprise ?
COMMENT ?
- avec quelles initiatives et quels capitaux ?
La préparation ne vise pas tant à accumuler les questions pour que chacun ait la sienne, qu'à produire un ensemble qui puisse valoriser les connaissances déjà acquises et à en acquérir d'autres.
Le schéma construit dans une démarche de tâtonnement expérimental pendant six mois environ fait apparaître très vite les manques. Il appelle sans cesse de nouveaux questionnements, des compléments, l'utilisation profitable des erreurs. Bertrand, au C.M.2, devant la montagne de produits finis entreposés dans la cour d'une usine, demande si le produit ne se vend plus, s'il est trop cher, démodé, si son utilisateur a disparu... ce qui fait rire les services économiquesqui n'auraient jamais eu l'idée de telles questions.
Dès la première utilisation de cette grille nous avons eu à notre disposition un bon bagage de connaissances... d'où de nouvelles interrogations auxquelles il est parfois impossible de répondre dans ce cadre précis. Martine demande, par exemple, si une telle grille pourrait s'appliquer à l'étude de la Préfecture où travaille sa mère. Autre recherche à faire !
Des questions, on passe ainsi à l'hypothèse qu'il faudra vérifier
*.Schématisons : (voir encadré ci-dessous)
 
Information                -----> Question brute   ----->   Hypothèses   ----->   Vérification
utilisation du savoir
 
Le maître aide à construire la démarche au fur et à mesure. Mais il n'a pas à s'engager dans des explications prématurées ou trop complexes. Il doit aussi se méfier de son "inculture" économique et de ses propres opinions : tendances politiques militantes, positions écolos radicales...
* Le lecteur peut se reporter, à ce sujet, au schéma général de l'expérience tâtonnée paru récemment dans le dossier du numéro 84 de la revue (décembre 1996) page7.
La préparation comporte aussi une prise de contacts préalables avec les responsables de l'entreprise afin de bien préciser les conditions de la visite : intervenant qui pourra répondre de façon claire et juste, champ des investigations, lieu où la classe sera reçue pour pouvoir poser ses questions dans le calme. Les enfants doivent savoir aussi qu'ils auront à maîtriser leurs demandes et peut - être à exercer un certain sens critique vis à vis du discours qu'on leur aura tenu. Ils le feront souvent d'eux - mêmes avec leur bon sens ! Mais si l'on doit relativiser certaines réflexions faites sur le bruit, les odeurs, il faut bien insister sur le fait que l'entreprise c'est d'abord des hommes : ils y travaillent, ils touchent un salaire.
Visite d'une entreprise : affaire courante ? Pas si sûr ! Après avoir entraîné des collègues dans une usine de la ville où travaillent des parents d'élèves et d'anciennes élèves, le responsable syndical nous dit : "Merci ! Vous êtes les premiers à nous avoir rendu visite".
Jean-Marie Boutinot
 II. Schéma d'étude d'une entreprise                    
Avec mes élèves de seconde, j'avais pris l'habitude d'aborder cette question en utilisant une parabole, celle de la montagne.
Quel que soit le point de vue (Nord, Sud, Est, Ouest) c'est toujours la même montagne que l'on regarde mais ce n'est jamais la même chose que l'on voit ! Aussi la présentation de l'entreprise dépend - elle de ce que l'on veut montrer. (voir schéma 1)
De la pyramide précédente, chaque face donne un certain regard sur l'entreprise :
- la base renvoie à une organisation humaine (la division du travail : direction, encadrement, production, rapports hiérarchiques, conflits, etc ...)
- la première face peut donner l'entreprise comme unité de production et faire réfléchir sur la notion de facteur de production (travail, capital, progrès technique, lien entre progrès technique et emploi, qualification du travail, etc... )
- une deuxième face peut donner l'entreprise comme un système de comptes et permettre de développer le thème de la gestion de l'entreprise (dépenses, recettes, salaires, créances, dettes, amortissement, bilan, compte d'exploitation,équilibre des comptes, calcul de profit, etc...)
- une troisième face enfin peut donner l'entreprisecomme un ensemble plongé dans un environnement dont elle tire ses ressources (achat des facteurs de production) mais qui lui impose aussi une contrainte, celle du marché (concurrence, profit, croissance,investissement, mais aussi faillite, liquidation de l'entreprise, etc...)
Il me semblait utile de choisir comme objectif l'idée que l'entreprise, pour continuer à manier la métaphore, est comme un être vivant à qui on a donné naissance, sujet à un développement complexe en interaction avec son environnement, toujours menancé d'une éventuelle disparition.
Peut - être est - il possible de traduire cela par quatre sous - ensembles dont il faudrait montrerqu'ils sont étroitement imbriqués pour devenir "l'entreprise" concrète. (voir schéma 2)
Jean-José Quilès
A propos de la pyramide de J.José Quilès                    
Cette montagne - pyramide de J.J Quilès me fait penser qu'une telle forme induit toujours la notion de hiérarchie, voire de pouvoir. On pourrait utiliser ce phénomène de façon très positive en en changeant la base, selon les besoins. Il s'agit en effet de rentrer dans un système comprenant donc quatre portes pouvant être prises les unes ou les autres comme base. Le schéma perd alors sa rigidité et on s'en sert en fonction de la problèmatique que l'on s'est fixée.
Dans le premier cas, le sommet représente le pouvoir des dirigeants de l'entreprise. Il traite des rapports de production. Le deuxième est dominé par les facteurs de production. Dans le troisième, c'est le rôle primordial du capital et certainement de ses liens avec des puissances d'argent extérieures : nous sommes dans le mode de production. La quatrième face peut - être le point de départ pour replacer l'entreprise sur un plan très large où domine la notion d'écologie humaine !
A chaque fois, bien sûr, tout est dans tout mais avec un souci précis, un fil directeur dans la démonstration qui ne se perdra pas dans de multiples voies annexes.
Une petite remarque : dans une étude, même réalisée au niveau du primaire, il convient de distinguer l'usine ou l'établissement industriel de l'entreprise.
Pierrette Guibourdenche